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Parisiens pour la plupart, plus capables d’apprécier les charmes d’une petite actrice que ceux de la vie des champs.

Le Français voit tout à travers le roman et le théâtre.

L’Européen, établi ici, est pour lui ce fameux oncle d’Amérique, fabuleusement riche, qui arrive, juste à temps, au cinquième acte, pour faciliter le mariage du beau jeune homme aussi noble que pauvre, avec l’ingénue et arracher cette dernière aux flammes bourgeoises d’un parvenu. Il s’imagine qu’arrivé au Canada, il n’a qu’à acheter une terre, se procurer un fermier, et que, dans peu d’années, il aura refait sa fortune si les ours ou les sauvages n’abrègent pas ses jours.

M. de V. m’a raconté plaisamment que, parti de Paris armé comme Tartarin se rendant en Afrique, il avait été fort désappointé dans son voyage. Rendu au Lac St-Jean, il n’avait pu tuer qu’un écureuil et n’avait rencontré que des sauvages plus civilisés que lui et parlant trois langues : l’anglais, le français et le montagnais.