Page:Paquin - Le paria, 1933.djvu/200

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sa jeunesse chanta. Il se promenait, rue Craig quand il vit deux individus dans leur pittoresque costume de lumberjacks. Par un besoin irraisonné et auquel tout être, même le plus fort, succombe, de soulager son âme par des confidences spontanées, Jacques Bernier les suivit dans un bar, s’attabla avec eux. Il se laissa gagner à la magie de leurs récits et la vie large du lointain nord lui apparut dans toute la séduction de sa poésie.

Il envia leur sort. Ils n’étaient à Montréal que pour quelques jours. Ensuite, ils retournaient vers le bois :

— Vois-tu l’ami, dit l’un des deux, le bois c’est plus fort que nous autres. Faut qu’on y retourne. Quand même ça paye pas gros, on aime ça.


Le mépris dans lequel Jacques Bernier enveloppait tout être était si puissant que lui-même en était l’esclave.

Il en était rendu au point où il aspirait à s’en évader.

De tous les hommes qu’il avait connus, un seul s’était intéressé à lui, un seul lui avait montré un peu d’affection : le curé de Valdaur, l’abbé Boudrias.