Page:Paquin - La tragique idylle, paru dans Mon Magazine, jan-fev 1927.djvu/7

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il avait connu Rose-Marie alors qu’elle avait vingt ans, peu de temps après que son père, autrefois de Québec, fut venu s’établir à St-X… après la mort de sa femme. Elle était agréable de manières, bien formée de taille.

L’année d’avant, elle avait terminé ses études, chez les Sœurs de la Présentation, à St-Hyacinthe.

Ils se rencontrèrent un dimanche, après la messe. Quand il leva sur elle ses naïfs yeux bleus toujours humides, elle comprit, intuitivement qu’une page de sa destinée venait de s’ouvrir. Lui aussi. Il la regarda longuement s’en aller au bras de son père, admirant sa ronde taille et sa légère démarche.

Au moindre prétexte, il allait au magasin de M. Charron. Il savait qu’elle s’y tenait. À leur première entrevue, il rougit et balbutia des phrases vagues… Elle aussi rougit. Ils restèrent quelques instants, debout à se regarder sans se rien dire. Puis, ils sourirent. Leurs regards se rencontrèrent. Ils se comprirent. Ils se comprirent si bien qu’ils se fiancèrent. Ils devaient se marier au mois de juin, vers la fin, quand un jour…

Un matin, Lambert avec deux compagnons, partit pêcher la truite à un lac situé à une quinzaine de milles de St-X… En cas d’apercevoir du gibier il avait emporté sa carabine, une 44-55 Winchester.

Après avoir fait le tour du lac en canot, il accosta. Les deux compagnons débarquèrent les premiers. Comme il sauta à terre, un coup de vent éloigna le canot. Voulant le ramener au rivage, il saisit le canon de la carabine, debout dans l’embarcation, et buta contre une pierre. Le chien de l’arme s’accrocha et il reçut la décharge en pleine figure. Le plomb lui laboura les lèvres et le nez