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par un je ne sais quoi de troublant qui s’en dégage, paralysant ses facultés cérébrales.

— Pauline, reprend-il, et il s’arrête de nouveau, cherchant la suite de ses idées.

Elle le regarde d’un long regard chargé de pitié.

Ce regard où il croit saisir une marque d’affection le stimule. Il pose, nette, précise, la question qui lui brûle la gorge.

— Pauline, pourquoi avez-vous changé ?

— Je n’ai pas changé, mon pauvre ami. Mes sentiments pour vous sont toujours les mêmes. J’ai beaucoup d’amitié, beaucoup de sympathie. Cela ne vous suffit pas ?

— Non, cela ne me suffit pas. J’exigeais autre chose de vous : votre amour. Vous me l’aviez accordé. Pourquoi me l’avez-vous retiré ?

— Henri, écoutez-moi. Je veux tout vous expliquer, éclaircir notre situation. J’ai cru vous aimer. Je l’ai cru sincèrement. Un jour je me suis aperçu que c’était un autre que j’aimais.

À chacune de ces paroles, une douleur aigüe traverse le cerveau du jeune homme, une tige de fer rougie lui entre dans la tête… Haletant, dur, les yeux mauvais, il demande :

— Et cet autre ?….

Il se penche sur elle pour recevoir la réponse.

Elle regarde dans le vide, les yeux mi-clos ; elle voit un homme aux traits d’acier, un homme qui s’est emparé d’elle, d’elle toute entière, qui la possède toute, sans même qu’il l’ait voulu. Cela