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clumes ; celui plus criard et perçant des boulons que l’on rive ; grincement des essieux ; stridence du sifflet des remorqueurs ; cris des charretiers commandant les chevaux ; appel des contremaîtres ; et puis dominant tous ces bruits, celui, formidable, de l’eau qui rage contre les roches. Au quai temporaire, dans la baie, au bas de la chute, des chalands et des barges sont amarrés, les uns chargés de planches, de brique ou de fer ; d’autres de provisions de bouches ; d’autres d’avoine, de foin ou de bétail ; d’autres d’effets de ménage.

Au centre du village d’où rayonnent les rues comme des jantes de roues, une bâtisse plus grande que les autres renferme les bureaux et les magasins de la compagnie. Un régiment de commis s’y divisent la besogne. Tout va rondement. Il faut qu’avant un mois — ce sont les ordres reçus de Montréal — les travaux soient terminés.


C’est le soir. D’immenses lumières à acétylène éclairent les équipes qui remplacent celles du jour. Des groupes circulent par les rues. L’air est surchauffé. Au restaurant, des jeunes gens discutent avec animation. À un carrefour, un homme, monté sur une boîte retournée à l’envers, harangue une cinquantaine d’ouvriers.

À l’usine, l’ingénieur, chargé de la surveillance de nuit, remarque quelque chose d’insolite chez ses hommes. Ils s’arrêtent souvent à causer. Il en surprend dont les gestes sont lourds de menaces.