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qui lie l’Angleterre et le Portugal. Et ainsi vous n’auriez plus rien à craindre des empiétements de vos ambitieux voisins.

« Ils ne sont déjà que trop formidables, et pour peu qu’à leurs ressources vinssent s’ajouter celles des Canadas, ils pourraient bien porter atteinte à la suprématie anglaise sur les mers. Or, si jamais l’Angleterre descendait au rang de puissance du troisième ordre, serait un malheur pour l’humanité. Car, avec des institutions aussi parfaites que les siennes et une primauté généralement reconnue, l’Angleterre est sur le continent l’appui de tous les peuples opprimés, et souvent ses représentations ont arrêté les gouvernements absolus dans leurs projets tyranniques.

« Une grande lutte est à la veille de s’engager sur tous les points de l’Europe continentale entre deux principes ennemis. D’une part, l’amour d’une liberté qui pourrait devenir indocile et turbulente chez les peuples encore peu préparés à la recevoir ; d’autre part, une répugnance calculée chez les rois à concéder des réformes promises par eux au jour des frayeurs que leur a fait éprouver le prisonnier de Sainte-Hélène. Or, l’Angleterre serait la puissance modératrice appelée à empêcher la répétition du spectacle de sang, de despotisme et d’impiété donnée par cette France révolutionnaire, qu’il aurait fallut mettre au ban des peuples si elle n’avait pas accepté la restauration, seul lien de réconciliation, seule garantie de repos, après l’usurpation du trône français par le soldat ambitieux qui s’y était assis.

« Eh bien ! l’exemple des États-Unis est une cause perturbatrice qui fait obstacle à la réalisation de ces plans. Je sais bien que ce sont des enthousiastes, étrangers à la pratique des affaires, qui s’enflamment pour cette démagogie américaine, fabrique de sable sans ciment, destinée à crouler au premier jour, mais enfin leurs écrits font des disciples, ils alimentent les mauvaises passions, ils enrôlent les hommes de néant qui cherchent dans le renversement des ordres supérieurs, rang et fortune. Et je vous avoue que tous ces cris de « gouvernement à bon marché, » de souveraineté exclusive du Peuple à l’instar des Américains, nous inquiéteraient fort, si nous ne voyions clairement que,