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10 PRÉFACE.

nous disons, l' éclat de la lumière, l’éclat du son, l' éclat de la vertu, dans la première phrase, le mot éclat est pris dans le sens propre & primitif. Dans la seconde phrase, le mot éclat est transporté par extension de la lumière au bruit, du sens de la vue, auquel il est propre, au sens de l’ouïe, auquel il n'appartient qu'improprement. On ne doit pourtant pas dire que cette expression l'éclat du son soit figurée, parce que les expressions figurées sont proprement l'application qu'on fait à un objet intellectuel d'un mot destiné à exprimer un objet sensible, comme on peut le voir dans la troisième phrase, où éclat est pris dans un sens figuré.

Le sens propre des mots, dit toujours M. d'Alembert, à qui nous devons cette manière si philosophique de les envisager, a un usage fixe, déterminé, unique, ensorte qu’il n'y a jamais qu'une seule espèce de phrase où l’on puisse employer ce sens propre, au lieu que le sens par extension, & le sens figuré, peuvent avoir différentes acceptions, différentes nuances, se diversifier plus ou moins dans ces nuances & ces acceptions, & par conséquent entrer dans différentes sortes de phrases. Pour distinguer ces nuances & ces acceptions, nous commençons, comme l'enseigne l'illustre Auteur dont nous copions ici les expressions, par définir les mots dans leur sens propre le plus restreint & le plus rigoureux ; nous parcourons ensuite par degrés toutes les nuances que ce premier sens a produites pour exprimer d'autres idées : par-là on rapporte toutes ces différentes acceptions à un premier sens propre & primitif, & l'on voit comment ce sens primitif s'est en quelque sorte dénaturé par des nuances & des gradations successives.

C'est ainsi que nous avons tâché de réaliser pour cette partie de la Grammaire, le Dictionnaire dont M. d'Alembert a tracé le plan dans ses Elémens de Philosophie, & dont il desiroit l'exécution. Il a bien voulu nous permettre de nous approprier là-dessus ses idées ; il nous a même aidés de ses conseils, & si nous avons bien saisi son plan, l'Ouvrage, comme il le dit lui-même, ne peut manquer d'être très-philosophique & très-utile.

Après cette exposition & cette explication de tous les sens d'un mot, on le compare avec les mots qui peuvent lui être synonymes, & l'on s'attache à développer toutes les nuances qui les différencient. Les Synonymes de M. l'Abbé Girard nous ont servi de guide & de modèle : on doit sentir combien de telles observations peuvent contribuer à la pureté & à l'énergie du style.

Si le mot est un adjectif, on dit s'il doit précéder ou suivre son substantif, selon les règles du goût & de l'usage. Si c'est un verbe,