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qui pouvait les empêcher par un seul mot, et qui ne daigna pas jeter sur cette innocente victime un seul regard de pitié. Loin de lui donner aucun soulagement, on le chargea d’une cangue très-pesante, on lui serra si rudement les bras dans des menottes dont les trous étaient trop étroits, qu’il a avoué dans la suite que cette douleur lui avait paru plus aiguë et plus insupportable que toutes celles qu’il avait endurées pendant deux ans de prison.

En ce triste état, on le mit avec M. Dular, officier français, qui avait été traité avec la même barbarie dans une galère, où on leur fit passer le fleuve, et ils trouvèrent à l’autre bord tous les Français assommés de coups et chargés de cangues et de menottes. Le prélat, en abordant, tomba dans la vase, et il y aurait perdu la vie, si on ne se fût hâté de l’en retirer. Il passa le reste du jour et toute la nuit suivante dans ses habits mouillés et couverts de boue, ce qui le rendit pendant trois mois comme perclus de la moitié du corps.

Le lendemain matin, les Siamois le voyant moribond, lui ôtèrent la cangue, le conduisirent à Bangkok et le renfermèrent dans une cabane voisine de la maison d’une femme chrétienne fort âgée qui avait souvent ressenti les effets de sa cha-