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tière se met à pousser des cris déchirants et à faire des lamentations en s’adressant au défunt : Ô père bienfaiteur ! pourquoi nous quittez-vous ? qu’avons-nous fait pour vous fâcher ? pourquoi partez-vous ainsi tout seul ? c’est votre faute ; pourquoi avez-vous mangé tel fruit qui vous a donné la dyssenterie ? nous l’avions bien dit ; pourquoi n’avez-vous pas voulu nous écouter ? Ô malheur ! ô désolation ! ô inconstance des choses humaines ! On se jette aux pieds du défunt, on pleure, on crie, on le salue, on lui fait mille reproches d’amitié, et au bout d’un quart d’heure la douleur a épuisé ses accents lamentables ; on lave le corps, on l’enveloppe de toile blanche ; on le met dans un cercueil qu’on couvre de papier doré et de fleurs découpées de clinquant ; on prépare un dais qu’on orne de dentelles en papier, de guirlandes de fleurs, de ciselures en clinquant et d’une multitude de petits cierges. Un ou deux jours après, on enlève le cercueil et, au lieu de le faire passer par la porte, on le descend dans la rue par une ouverture pratiquée au mur ; on lui fait faire trois fois le tour de la maison en courant pour que le mort oublie le chemin par où il a passé et qu’il ne revienne pas tourmenter les vivants ; puis on dépose le cer-