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DE LA MARNE.

que combien que c’est vne eau, et parmy les autres eaux que c’est celuy qui soustient pailles et foins, et toutes especes d’arbres et plantes, mesme les hommes et les bestes, et t’ay dit mesme que les os de l’homme et de la beste sont endurcis et formez de ceste belle substance generatiue ; et comme tu vois qu’au commencement la marne est vne terre tendre et fluante, et puis, de là deuient en marne plus dure, et de marne en craye, et de craye en pierre, par la vertu de laquelle eau aussi les os de l’homme et de la beste (qui sont espece de pierre et cassent quand ils sont secs comme pierre) iceux di-ie sont en eau pareille que dessus. Premierement fort tendres, comme ie t’ay dit de la marne, et puis deuiennent durs comme pierre quand ils sont paruenuz à leurs decoction et maturité, et tout ainsi que tu vois que les pierres ou cailloux qui sont generez et formez de ceste eau congelatiue, endurent le feu et ne se peuuent consommer au feu, ains se vitrifient, tu vois aussi que cest element generatif duquel ie t’ay parlé ne peut estre consommé estant aux pailles et aux foins, car si tu brusle de la paille, du foin, ou du bois, toute l’eau commune s’en ira en fumée, mais ceste eau generatiue qui a soustenu, nourri et a creu le foin et la paille, demeurera aux cendres et ne pourra estre consommée, ains se vitrifiera estant és fournaises ardantes, desquelles cendres l’on pourra faire du verre qui sera transparent et candide, comme l’eau generatiue estoit auparauant sa congelation ; et si ainsi est des cendres des bois, des pierres qui pour le fait de ceste semence generatiue, souffrent les effects du feu, aussi tu vois semblablement qu’il n’y a rien qui résiste plus au feu que les os de plusieurs bestes, comme tu as veu plusieurs fois que i’ay fait brusler des os de pieds de mouton, et quelque grande chaleur qu’il y eut és fournaises, il n’est possible de les consommer par feu, ny semblablement la coquille des œufs ; qui te doit faire croire que Dieu a mis un ordre en nature en telle sorte, que les os ont attiré et attirent ordinairement plus abondamment de laditte eau generatiue, que non pas les autres parties ; et comme i’ay dit autre part, ne faut douter qu’il n’y en ait vne bonne partie en la prunelle des yeux, et par ce qu’elle est humectée et accompagnée de l’eau exalatiue, cela empesche que laditte prunelle ne se petrifie. Nous auons les miroirs et lunettes qui nous rendent tesmoignage qu’il y a quelque af-