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DV SEL COMMVN.


Theorique.


I e n’eusse pas pensé qu’il y eust eu tant d’especes de sels, qu’ils eussent eu tant de vertus, si tu ne me l’eusses dit : Mais puis que nous sommes sus le propos des sels, deuant que passer outre, ie te prie me faire le discours de la maniere de faire le sel commun, comme il s’en fait aux isles de Xaintonge, et me monstre la figure de la forme comme sont fait les marez salans : car tu le sçais bien, d’autant que ie t’ay ouy dire qu’autrefois tu as esté sur les lieux auec commission de figurer lesdits marez.

Practique.

Ce qui est vray ; ce fut du temps que l’on vouloit eriger la gabelle audit pays. Or puis que tu as enuie d’entendre ces choses, donne moy audience et ie t’en feray volontiers le discours, et puis ie t’en monstreray vne figure.

Premierement, tu dois entendre que d’autant que la mer est presque toute bordée de grands rochers ou de terres plus hautes que non pas la mer, pour faire les marez salans, il a fallu trouuer necessairement quelque plaine plus basse que la mer : Car autrement il eut esté impossible de trouuer moyen de faire du sel à la chaleur du soleil : Et faut croire que si l’on eut trouué en quelque autre partie de la France limitrophe de la mer, lieu propre pour former marez, qu’il y en auroit en plusieurs endroits. Or ce n’est pas assez d’auoir trouué vn platin ou campagne plus basse que la mer : mais il est aussi requis que les terres où l’on veut eriger marez, soyent tenantes, glueuses, ou visqueuses, comme celles dequoy on fait les pots, briques et tuilles. Il y a vn seigneur d’Anuers qui a beaucoup despendu pour faire des marez és pays bas, en la forme et semblance de ceux des isles de Xaintonge. Mais combien qu’il ait trouué assez de lieux bas pour faire venir l’eau