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DE L’OR POTABLE.

posant à ses disciples comme doctrine bien asseurée[1]. Quand il n’y auroit que cela, c’est assez pour te rendre confus en tes arguments.

Theorique.

Et comment oses tu tenir vn tel propos ? veu que tant de milliers de medecins ont de si long temps ordonné de l’or pour seruir de restaurant aux malades, et mesmes les medecins Arabes en vsoyent, qui estoyent les plus excellens de tous les autres.

Practique.

Ie t’accorde qu’il y a vn nombre infini de medecins qui ont fait bouillir des pieces d’or dedans des ventres de chapons, et puis faisoyent boire le bouillon aux malades, et disoyent que le bouillon auoit retenu quelque substance de l’or, par ce que lesdittes pieces estoyent vn peu blanchies sur la superficie à cause du sel et de la graisse : Ce qui estoit faux, et s’ils eussent poisé lesdittes pieces, apres les auoir bouilli, ils les eussent trouué aussi poisantes que deuant. Autres faisoyent limer lesdites pieces d’or, et faisoyent manger la limeure aux malades, parmy quelque viande : ce qui estoit pire que s’ils eussent mangé du sable. Autres prenoyent de l’or en feuille de quoy vsent les peintres : mais tout cela seruoit autant d’vne sorte que d’autre.

Theorique.

Encores que l’or ne serue rien aux malades en la sorte que tu dis, tu ne peux nier qu’il ne leur serue quand il est potable. Car les alchimistes qui le rendent potable le calcinent en poudre fort subtile, et quand il est meslé parmy quelque liqueur, il s’incorpore aussi bien comme pourroit faire la graisse de chapon parmy le bouillon. Voila comment et par quel moyen l’or peut seruir à restaurer et nourrir le malade.

Practique.

Tu n’entens pas bien ce que tu dis. Car tu sçais bien que les fournaises de feu ne peuuent consommer l’or pur ; comment seroit il donc possible que l’estomac d’vn malade le peut

  1. Gobet assure que ce médecin était Germain Courtin, qui publia un livre sous ce titre : Germani Courtini, medici Parisiensis, adversùs Paracelsi de tribus principiis, auro polabili, tolâque pyrotechniâ portentosas opiniones, diaputatio. In-4o, Parisiis, 1579.