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DES EAUX

Theorique.

Voire mais si ie couure ledit parterre paué de terre, et que ie seme quelque chose dessus, les eaux qui passeront submergeront les semences que i’y auray semées.

Practique.

Tu as fort mal retenu le propos que ie t’ay dit plusieurs fois, que les terres spongieuses et labourées ne peuuent contenir l’eau, parquoy tu dois entendre que les pluyes qui tomberont dedans ton parterre descendront à trauers des terres iusques sur le paué et trouuant la pente d’iceluy, descendront iusques au sable qui sera ioignant les receptacles, et en continuant passeront à trauers des sables, pour se rendre iusques au premier. Cela te doit bien faire considerer que les eaux des pluyes qui tombent par les montagnes, terriers et toutes places qui ont inclination vers le costé des riuieres ou fontaines, ne s’y rendent pas si soudain. Car si ainsi estoit toutes sources tariroyent en Esté : mais par ce que les eaux qui sont tombees durant l’Hyuer sur les terres ne peuuent passer promptement, mais petit à petit descendent iusques à ce qu’elles ayent trouué la terre foncée de quelque chose, et quand elles ont trouué le roc elles suyuent la partie inclinée, se rendant és riuieres, de là vient qu’au dessouz desdites riuieres, il y a plusieurs sources continuelles : et par ainsi, ne pouuant passer que peu à peu, toutes sources sont entretenues depuis la fin d’vn hyuer iusques à l’autre.

Theorique.

Tu m’as donné le desseing de trois fontaines, deux és montaignes et vne en plat pays : mais d’autant que celle du plat pays ne se peut faire sans frais, et tous n’ont pas la commodité des montagnes, ne me sçaurois tu donner quelque inuention, de laquelle les laboureurs se puissent aider en plat pays, sans estre contrains de pauer la sole ? parce que tous n’ont pas la puissance d’auoir du paué : mesme qu’il y a plusieurs campagnes où l’on ne sçauroit trouuer ny pierre, ny brique, ny terre argileuse.

Practique.

Si i’estois homme de village, et que mon habitation fut en plaine campagne, i’aurois espoir de trouuer moyen de faire quelque fontaine pour la prouision de ma famille.