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ET FONTAINES.

Theorique.

Tu m’as cy deuant fait entendre que si les eaux des bains de Bauieres, Cauterets, Argelais et Aix, auoient quelque vertu de guarir les maladies, que cela se faisoit par la vertu des sels, et à présent tu dis que la mine de fer cause la vertu de l’eau de Spa.

Practique.

Quand tu auras bien entendu tout mon discours, tu connoistras que le fer n’est engendré d’autre chose que de sel. Mais par ce que ce propos se trouuera mieux à point en prouuant qu’il y a du sel en toutes choses, ie l’y reserveray.

Theorique.

Si ainsi est nous ne mangerions point de beurre frais. Ie ne vis iamais vn plus arresté, sur ces sels. Mais me penserois tu faire croire qu’il y eust du sel souz la terre, et que les eaux le puissent amener pour causer les effects de la medecine ?

Practique.

Tu n’es guere sage de faire une telle demande, as tu point ouy dire à ceux qui sont venus de Polongne que la miniere de sel est merueilleusement basse dedans terre ? n’as tu pas aussi ouy dire qu’il y a des puits salez en Lorraine ? Il me semble l’auoir dit cy dessus. Ne sçait on pas qu’en Bearn il y a des fontaines salees, desquelles l’on fait le sel qui fournist la pluspart dudit pays, et de Bigorre ? Ce n’est pas encores assez : car quand il n’y auroit point de sel commun és terres et canaux où le feu est allumé, par où les eaux chaudes passent, il y en aura de plusieurs autres especes : par ce que si le feu qui est embrazé dedans les parties sousternees trouue du marbre, ou autre espece de pierre, de laquelle l’humeur ne soit fixe, le feu les calcinera, et estant reduites en chaux, les eaux qui passent par laditte chaux dissoudront le sel qui estoit au marbre, et autres pierres imparfaites ; i’appelle pierres imparfaites celles qui sont suiettes à se calciner. Les parfaites ne se calcinent iamais, ains se vitrifient. Item, si le feu qui est allumé, et qui a causé la chaleur des eaux s’est attaché és mottes de terre, qui sont pleines de petites racines, ce qui les fait brusler, les mottes et racines estant bruslees, laisseront le sel qui est en elles, et l’ayant laissé dedans les cendres, et les eaux passant au trauers d’icelles ne faudront iamais d’emporter le sel dissout en icelles : autant s’en pourra faire des