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ET FONTAINES.

eust peu durer, et n’y eust fallu faire tant de regards[1].

Theorique.

Puis que tu trouues tant d’imperfections és eaux des mares, puits et és conduits ou tuyaux des fontaines, ie te veux à présent faire vne demande, asçauoir qui est la cause que les sources des fontaines naturelles sont meilleures les vnes que les autres.

Practique.

Vn homme qui a hanté les minieres, fossez et tranchees, et qui a consideré les diuerses especes des terres argileuses, et qui a voulu connoistre les diuerses especes de sels et autres choses fossiles, il peut aysément iuger de la cause de la bonté ou mauuaistié des eaux prouenans des sources naturelles. Et pour en donner iugement certain, il faut premierement considerer qu’il n’y a aucune partie en la terre qui ne soit remplie de quelque espece de sel, qui cause la generation de plusieurs choses, soit pierre, ardoise, ou quelque espece de metal ou mineral, et est chose certaine que les parties interieures de la terre ne sont non plus oysiues que les exterieures, qui produisent journellement arbres, buissons, ronces, espines et toutes especes de vegetatif. Il faut donc conclure qu’il est impossible que le cours des fontaines puisse passer par les veines de la terre sans mener auec soy quelque espece de sel, lequel estant dissoult dedans l’eau est inconneu et hors du iugement des hommes : et selon que le sel sera veneneux, il rendra l’eau veneneuse ; comme celles qui passent par les minieres d’airain, elles amenent auec soy vn sel de vitriol ou coperoze fort pernicieux : Celles qui passent par des veines alumineuses on salpestreuses, ne peuuent amener sinon la substance salsitiue par où elles passent : et si aucunes sources passent par des bois ou troncs pourriz dedans terre, telles eaux ne peuuent estre mauuaises, par ce que le sel des bois pourriz n’est veneneux comme celuy de la coperose. Ie ne dy pas qu’il n’y aye quelque arbre, et consequemment des plantes, desquelles

  1. Palissy jette ici le blâme sur les travaux exécutés à Saint-Cloud par Nicolas Wasser-Hun, Jean de Sponde et Paul de La Treille, privilégiés par lettres patentes de Roi Henri III, du 7 mars 1585. Ce privilége, assez curieux par les projets qu’annonçaient les inventeurs, fut imprimé chez Frédéric Morel, in-12, 1585. Il est rapporté par Gobet, dans l’édition de 1777, p. 675.