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À l’idée du Fatalisme la science moderne a substitué l’idée du Déterminisme scientifique.

Certains ont divinisé le Déterminisme et l’ont regardé à son tour comme une puissance mystérieuse et inéluctable pesant de tout son poids sur la destinée des individus.

Cette divinisation du Déterminisme est illégitime. Il faut prendre le Déterminisme pour ce qu’il est : un symbolisme relatif à notre pensée, une notation, la plus commode et la plus précise possible, au moyen de laquelle l’intelligence s’efforce de se représenter l’univers et la vie. Si l’on entend ainsi le Déterminisme, la science n’est nullement l’ennemie de l’Individualisme. Car il ne put y avoir d’épanouissement de l’individualité sans la conscience claire que l’Individu perd de lui-même et de son milieu social. « Le déterminisme, dit Nietzche, est une mythologie ; dans la vie il n’y a que des volontés fortes et des volontés faibles. C’est presque toujours un symptôme de ce qui lui manque, quand un penseur dans tout enchaînement causal éprouve quelque chose comme de la contrainte, un besoin, une obligation, une pression, un manque de liberté. C’est une révélation de sentir ainsi ; la personne ne trahit… elle trahit sa faiblesse, son besoin de servitude[1]. » — « Il convient, dit encore Nietzche, de ne se servir de la « cause » et de « l’effet » que comme de simples conceptions, de fictions conventionnelles pour l’indication et la nomenclature, — non pour l’explication. »

Nous conclurons de tout ceci que la conscience sociale de l’avenir, dominée par le principe de la Relativité, gravitera autour de ces trois idées : l’idée de Science, l’idée d’Humanité et l’idée d’Individualité.


  1. Nietzche, Par delà le Bien et le Mal, § 21.