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CHAPITRE IX


loi des formalismes sociaux. — loi du mensonge de groupe. — conclusion sur la conservation sociale

La loi des formalismes sociaux se rattache à ce que nous avons dit du dogmatisme social. — Comme tous les dogmes, les dogmes sociaux s’incarnent dans certains rites conventionnels et cérémoniels qui constituent ce que Tolstoï appellerait la religion du monde. Toute société, surtout si elle est — ou croit être — aristocratique, adopte un ensemble d’usages, de formalismes, de rites mondains qui sont pour elle un puissant moyen de conservation. Si quelqu’un s’amusait à dégager la philosophie d’un livre tel que les Règles du savoir-vivre de Mme la baronne Staffe, il est probable qu’il verrait que l’esprit de ces règles est un jaloux conservatisme de classe.

Les femmes jouent ici un rôle important. La femme est conservatrice et gardienne jalouse de l’étiquette. C’est elle qui régente ce qu’on appelle le monde. Le pouvoir de la « Dame » dans le monde bourgeois est à la fois occulte et omnipotent. « Je constate, dit un publiciste contemporain, chez l’immense majorité des femmes la superstition obstinée des compartiments et des étiquettes de la hiérarchie. Quel que soit leur rang, quelle que soit leur toilette, grattez la femme, vous trouverez la Dame, la terrible dame de Schopenhauer, avec sa préoccupation obsédante et maladive, d’égaler Mme une telle qui se croit supérieure et de se défendre rageusement pour tenir à distance Mme X…, qui vou-