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CHAPITRE III

L’ANTINOMIE DANS LA VIE AFFECTIVE


Considérons la sensibilité dans les facteurs qui concourent à la former ; puis dans sa nature et dans son évolution. Nous allons retrouver à propos de ces questions les deux tendances opposées que nous avons déjà rencontrées en étudiant l’intelligence. L’une sociologique qui insiste sur la part prépondérante du facteur social dans la formation et l’évolution de nos sentiments ; et par suite sur la possibilité d’une uniformisation, d’une rationalisation et d’une socialisation progressive des sensibilités ; l’autre, individualiste, qui reconnaît dans la sensibilité de chaque individu un fond irréductible aux influences sociales et qui conclut de là à l’impossibilité de réduire les différences sentimentales non moins que les différences intellectuelles.

Les sociologues s’efforcent de mettre en lumière le rôle du milieu social et de l’éducation dans la formation de nos sentiments. Ce rôle ne peut être nié. Il y a de grands courants sentimentaux comme il y a de grands courants intellectuels et ils agissent