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l’antinomie dans la vie intellectuelle

tions. Car comment établir des différences de valeur entre les intelligences et entre les pensées, sinon par des considérations d’utilité sociale et de culture humaine.

Par suite, dernière différence, l’individualisme stirnérien implique une antinomie absolue entre l’individu et la société, une absolue insociabilité intellectuelle. L’individualisme aristocratique n’aboutit qu’à une antinomie relative entre l’individu et la société ; il ne conclut pas à l’insociabilité intellectuelle. Le novateur doit sans doute engager une lutte terrible contre son milieu pour faire triompher l’idée nouvelle qu’il apporte ; mais il a foi dans cette idée et dans son triomphe ; il a foi dans la culture ; il se rattache à une série d’efforts où vient s’intégrer le sien ; il est un moment dans l’œuvre d’humanisation à laquelle il collabore. Le penseur individualiste fait ici un acte de foi en un idéal qui le dépasse.

Mais la question est de savoir si cet acte de foi n’est pas une duperie. Le progrès intellectuel n’est-il pas un vain mot ? L’idéal de la plus grande science, de la plus haute culture ne rentre-t-il pas dans ce cycle de l’éternelle Illusion dont a parlé M. de Hartmann et que Nietzsche semble avoir symbolisé dans sa conception de l’Éternel Retour ? Il est douteux en