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les antinomies entre l’individu et la société

l’originalité intellectuelle sous ses formes supérieures et les plus évoluées, un effort vers la philosophie et la science accrues, vers la pensée élargie. Il ne s’agit plus ici d’une originalité quelconque, d’une originalité simplement synonyme d’unicité, comme chez Stirner, mais d’une originalité supérieure ; d’une originalité orientée dans le sens d’un progrès intellectuel, dans le sens d’un idéal de science, de puissance et de culture humaine.

Cet individualisme n’est plus, comme celui de Stirner, un pyrrhonisme absolu, un pyrrhonisme qui, d’emblée, détruit tout devant lui. On peut se demander en effet si le développement de l’esprit critique aboutit forcément à supprimer tout acte de foi. En fait la critique de beaucoup de penseurs ne s’est appliquée qu’à un nombre limité de questions ; en rejetant certains actes de foi périmés, ils en conservaient ou même en instauraient d’autres. Vigny ne croit pas à la Providence ; mais il a foi dans la science (La bouteille à la mer). Renan ne croit pas à la religion révélée ; mais il croit à la raison, à la science. De même Guyau. M. A. France promène son scepticisme souriant sur toutes les idées et sur tous les dogmes ; mais par intermittences, il croit ou semble croire à la raison et au progrès. Plus d’un penseur de nos jours qui ne croit plus au Paradis croit à l’amélioration du sort de l’humanité sur la planète. C’est que toute activité