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l’antinomie dans la vie intellectuelle

raison, la révolte contre l’État, contre la morale, contre la société, contre toutes les idées qui ne sont pas la propriété exclusive et qui ne portent pas la marque de fabrique de l’Unique. Une fois qu’on a porté la sape dans certaines idées, il faut la porter dans toutes. Quand le doute a une fois attaqué un point de la vie intellectuelle et de la vie sociale, il se propage forcément de proche en proche, comme une carie qui gagne une dent après l’autre.

Tel est l’individualisme stirnérien ; théorie de l’absolue insociabilité intellectuelle ; négation absolue de la pensée sociale.

Ce qu’il y a d’outrancier, de simpliste, et, il faut bien le dire, de grossier et de brutal dans cet individualisme devait écarter de lui nombre de penseurs qui ne manquaient pourtant pas de hardiesse. C’est pourquoi à côté de l’individualisme stirnérien, absolu, purement négatif et destructif, égalitaire au fond, puisqu’il supprime toute hiérarchie des valeurs intellectuelles, il y a place dans l’histoire des idées, pour un individualisme plus large, plus compréhensif, plus raffiné, plus compliqué intellectuellement et sentimentalement, un individualisme que nous appellerons l’individualisme aristocratique.

Cet individualisme peut se définir un effort vers