Page:Palante - Les antinomies entre l’individu et la société, Alcan, 1913.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée
56
les antinomies entre l’individu et la société

porté la sape dans tous les fondements de l’édifice social.

Au XVIIIe siècle, l’esprit critique avait porté principalement sur la religion et engendré le voltairianisme. Mais après le scepticisme religieux, voici surgir un nouveau scepticisme ; le scepticisme à l’endroit de la Raison ; l’irrationalisme. — Après ce scepticisme ou en même temps que lui, en voici un autre qui s’attaque à la morale et qui nie l’influence des idées sur la conduite ; c’est le scepticisme immoraliste. — Reste debout l’idée de l’État, fondement de l’édifice politique. Le scepticisme va maintenant s’attaquer à elle. L’anarchisme bat en brèche non seulement la monarchie et l’oligarchie, mais la démocratie elle-même ; c’est le scepticisme politique. Enfin une dernière forme de scepticisme va plus loin encore. Elle s’attaque non plus seulement à l’État, mais à l’idée même de société, aux mœurs, à l’opinion, à toutes les idées sociales. C’est le scepticisme social. — Scepticisme religieux, scepticisme irrationaliste, scepticisme immoraliste, scepticisme politique, scepticisme social ; telles sont les principales étapes de la pensée individualiste, négative et destructrice, dans le cours des deux derniers siècles.

Stirner résume cette évolution. Raisonneur géométrique, il croit que tout se tient dans l’ordre intellectuel comme dans l’ordre social ; que la révolte contre la religion doit entraîner la révolte contre la