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les antinomies entre l’individu et la société

coup une leçon d’indifférence morale et de nihilisme social[1] ? A-t-elle vraiment unifié les intelligences ?

On a répété à satiété le mot connu : la science est encore ce qui nous divise le moins. Si on va au fond de cette assertion, on voit qu’elle ne signifie pas grand’chose. On pourrait y répondre, en parodiant un autre mot célèbre, que si un peu de science nous unit, beaucoup de science nous divise. On connaît les querelles souvent âpres entre savants, notamment entre biologistes. Luttes entre partisans de la fixité et darwiniens ; aujourd’hui luttes entre darwiniens et lamarckiens ; entre partisans et adversaires de la transmissibilité des caractères acquis, entre partisans et adversaires de l’épiphénoménisme mental, etc. Ces divergences, sans cesse renaissantes et souvent passionnées, sont connues de tous.

Nous ne dirons rien de l’extrême variété des opinions dans les sciences morales et sociales.

On peut se demander d’autre part si A. Comte, en subordonnant la science à la sociabilité, ne l’a pas amoindrie et rabaissée. Le souci exagéré du progrès de la sociabilité conduirait le savant à négliger les recherches qui n’ont pas une relation directement visible avec le bonheur humain. De là un rétrécis-

  1. Voir Le Dantec : L’athéisme.