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conclusions

Au lieu de cette solution unique et en quelque sorte rectiligne, M. Durkheim admettrait plutôt des évolutions partielles, variables avec la structure des sociétés et leurs conditions d’existence, chaque société se défendant comme elle l’entend et se créant son système de contraintes et de sanctions efficaces contre l’individu. La contrainte et l’obéissance forcée nous paraissent jouer un plus grand rôle dans la morale de M. Durkheim que dans celle de Spencer et surtout de Guyau. L’altruisme spontané y joue, par contre, un rôle moindre. Dans la morale sociocratique de M. Durkheim comme dans la morale chrétienne, l’individualisme reste le péché originel et indélébile qu’il faudra toujours combattre.

La solution de M. Durkheim nous paraît moins utopique que celle de Guyau et de Spencer ; plus modeste et plus conforme à l’esprit, scientifique, en ce qu’elle ne prédit pas le règne de l’altruisme universel. — Toutefois M. Durkheim nous semble trop compter sur les sentiments de résignation et d’obéissance que doit engendrer, selon lui, dans les âmes des individus, l’expérience des contraintes sociales et de la toute-puissance de la société. L’imperméabilité à l’expérience est la marque des vrais caractères. Chez les tempéraments individualistes, l’expérience des contraintes et des sanctions sociales, loin de provoquer la résignation et l’obéissance, ne provoque que la résistance, la révolte ouverte ou secrète.