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les antinomies entre l’individu et la société

lui faire prendre conscience de son état de dépendance et d’infériorité naturelles — qu’il s’en fasse par la religion une représentation sensible et symbolique ou qu’il arrive à s’en former par la science une notion adéquate et définie[1]. » La science sociologique assumera donc la même fonction qu’ont assumée jusqu’ici les religions ; elle courbera l’individu devant la société. La morale sociocratique est, comme les morales religieuses, une morale de la crainte et de l’automatisme.

La position de M. Durkheim nous paraît différer à la fois de celle de Guyau et de celle de Spencer. M. Durkheim n’admettrait pas avec Guyau que l’homme, l’individu, est spontanément sociable et altruiste, qu’il est socialisé d’emblée et qu’il ne peut y avoir conflit entre l’individu et la société et résistance sérieuse et profonde de l’individu à la société. Il admet l’existence de ces résistances mais il croit en même temps que la société est armée pour les mater.

D’autre part M. Durkheim nous paraît différer de Spencer en ce qu’il n’admet pas, comme ce philosophe, une solution globale, unique et universelle du problème des antinomies, solution obtenue par le jeu mécanique de la loi d’évolution et valant pour l’humanité entière devenue finalement altruiste.

  1. Règles de la méthode sociologique, p. 150.