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les antinomies entre l’individu et la société

occasion de renverser ce qui existe et jouit surtout du plaisir de la destruction.

L’antagonisme de ces deux âmes ne se fait d’ailleurs pas jour chez tous les hommes avec une égale intensité. Ceux chez qui l’antinomie arrive à son point culminant de sensibilité douloureuse sont des âmes complexes et délicates, ayant à la fois un besoin profond d’idéal, des aspirations vers une sociabilité supérieure, et un vif sentiment de l’individualité, un esprit d’indépendance qui les prédispose à souffrir des contraintes, des tyrannies et des hypocrisies inséparables de toute vie sociale (Vigny par exemple).

L’antinomie peut, en second lieu, être entendue dans un sens objectif. Elle est alors un conflit entre l’individu isolé et le groupe ou les groupes dont il fait forcément partie.

D’un côté, il y a un individu isolé, différent par hypothèse, des autres ; conscient de cette différence et entendant y persévérer ; un individu dissident ou révolté qui, en suite de son attitude, est plus ou moins mal vu, plus ou moins vilipendé et persécuté par le groupe. — Et d’autre part il y a le groupe conformiste et tyrannique, armé de ses sanctions. Ici, je ne suis plus en discorde avec moi-même. Je me heurte bel et bien à une force étrangère, extérieure à moi, et différente de moi et qui me fait très bien sentir son existence par les représailles qu’elle