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les antinomies entre l’individu et la société

un et universel. Elle admet une certaine diversité et relativité morale en raison de la diversité des « types sociaux ». Mais dans les limites d’un « type social » donné, les règles morales s’imposent à l’individu avec la nécessité d’une contrainte objective. Pour M. Durkheim, les règles morales expriment une force souveraine et toute-puissante devant laquelle l’individu n’a qu’à s’incliner. La volonté de Jehovah est remplacée par celle du groupe.

M. Lévy-Bruhl nous dit, il est vrai, que l’art moral déduit de la sociologie ne sera pas impératif à la façon des religions, ni même des métaphysiques morales. Il n’intimera pas d’ordres ; il procédera par lentes pressions sur l’opinion publique, par propagande, par exhortations et conseils. — Cela revient à dire que l’art moral sera une morale persuasive et non une morale impérative. Soit : mais comme le fait remarquer M. Faguet, l’art moral, s’appuyant sur des observations scientifiques, sur des statistiques, etc. ne manquera pas de se déclarer scientifique ; il se nommera art-moral-scientifique et se donnera l’autorité un peu insolente que se donne tout ce qui est scientifique ou qui croit l’être. « L’art moral ne sera pas impératif ; mais pour rébarbatif, je gagerais qu’il le sera[1]. »

M. A. Bayet manifeste, de son côté, une tendance

  1. E. Faguet. La démission de la morale, p. 241.