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l’antinomie morale

incertitudes de la morale ; d’inviter par là même l’individu à examiner de près son devoir, à le discuter et à composer avec lui. L’étude des cas de conscience conduit à individualiser la morale, à reconnaître qu’il y a autant de morales que d’individus, bien plus que le devoir varie avec les situations où l’individu se trouve engagé. C’est pourquoi il est à peu près entendu parmi les moralistes qu’il ne faut pas réfléchir beaucoup sur son devoir ; qu’il faut l’accepter et l’accomplir sans discussion et sans examen. Quand les moralistes consentent à examiner ces difficultés, leur solution consiste à isoler arbitrairement un des devoirs de l’individu, à le considérer seul et à le tenir pour absolument sacré. Les autres devoirs deviendront ce qu’ils pourront. Mais surtout, encore une fois, qu’on ne discute pas. La discussion morale est un prétexte que prend l’instinct égoïste pour résister sournoisement à l’instinct social et pour ruser avec la règle.

Une triple influence a contribué ou contribue au discrédit qui frappe aujourd’hui la casuistique : l’influence de la pensée universitaire ; celle de la pensée politicienne et celle de la pensée ouvrière qui représente actuellement le dernier terme de la pensée démocratique.

La pensée universitaire, imbue de rigorisme kantien, est naturellement ennemie de la casuistique.

De plus, les moralistes universitaires, opérant