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l’antinomie sociologique

l’individu ne sera plus un effet de l’entre-croisement des groupes.

Selon nous, l’individualisme sociologique de M. Bouglé qui consiste à faire de la libération de l’individu un produit social et un effet nécessaire du jeu même des lois sociologiques, cet individualisme méconnaît un fait psycho-physiologique capital. C’est que le véritable principe de la libération de l’individu n’est pas dans les conditions sociales extérieures à l’individu. Il est dans l’individu lui-même, dans sa physiologie, dans sa volonté native, présociale, d’unicité et d’indépendance. Si l’individu n’est pas, de lui-même, originairement et physiologiquement, un Unique, au sens qu’a ce mot chez Stirner, c’est-à-dire un être animé d’une personnelle volonté d’indépendance et résolu à ne pas se laisser aveuglement absorber par la société où les circonstances l’ont jeté, ni la loi de l’entre-croisement des groupes, ni aucune loi sociologique quelle qu’elle soit, n’aura la vertu de faire de lui un Unique. La multiplicité des groupes peut seulement lui fournir une occasion favorable et un moyen plus ou moins efficace de protéger son indépendance contre les empiétements de ces groupes, en les opposant les uns aux autres. Mais le fait même de recourir à cette tactique suppose chez l’individu une volonté antécédente (biologique et présociale) d’indépendance. Ce qui le prouve bien, c’est que des indi-