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l’antinomie juridique

Toutefois ce serait s’abuser que de croire que les causes d’antinomies entre l’individu et le régime juridique tendent véritablement à disparaître par le bienfait de cette évolution du droit.

Les contraintes juridiques, comme les autres contraintes sociales, se déplacent plutôt qu’elles ne disparaissent ; les liens légaux se dénouent, se relâchent et reculent sur certains points ; mais ils se renouent, se renforcent et se resserrent sur d’autres points. Le droit syndicaliste qui se substituera au droit bourgeois actuel supprimera certaines servitudes juridiques ; mais ce sera pour les remplacer par d’autres. Évolution du droit n’est pas synonyme de libération de l’individu. Certains groupes peuvent se trouver favorisés par cette évolution ; mais les individus n’en subissent pas moins la pression de ces groupes eux-mêmes. « Le droit dit M. J. Cruet, ne domine pas les mœurs : il les suit. » Mais les mœurs sont elles-mêmes une contrainte sociale, aussi tyrannique et parfois plus tyrannique pour l’individu que de droit lui-même. En tous cas, le droit nouveau, en tant qu’il reflète les mœurs nouvelles, ne fait comme le droit ancien, qu’affirmer la suprématie de la volonté sociale sur la volonté individuelle.

Aucune évolution du droit ne supprimera non plus l’écart entre le sentiment de la justice, tel qu’il est ressenti par chaque conscience individuelle et la