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les antinomies entre l’individu et la société

protestent contre le caractère mécanique de l’administration de la justice et réclament l’individualisation de la peine. Ils admettent qu’il ne doit plus y avoir élimination indistincte et mécanique de tous les individus qui ont troublé en quelque manière l’ordre public. Si les actes criminels sont peu divers, les processus psychiques qui les font naître sont nombreux. Il faudra distinguer les délinquants ; faire un triage entre eux, soigner, amender et réadapter ceux qui sont curables. Soit ; mais d’abord cette conception est loin d’être admise par tous les juristes. Ceux qui légitiment le châtiment par son exemplarité n’ont que faire de l’individualisation de la peine. Ensuite l’individualisation de la peine n’est jamais qu’une approximation par suite de l’impossibilité où est le juge de pénétrer dans le secret des cœurs. Ajoutons que l’individualisation de la peine se fait trop souvent à rebours. On distingue des « catégories de délinquants » non d’après leur psychologie individuelle, mais d’après leur rang social, leur parenté ou leurs relations[1]

  1. À propos d’un récent procès où le parquet avait fait un triage parmi les délinquants, poursuivant les uns comme meneurs, abandonnant les autres comme « menu fretin » un critique émet les réflexions suivantes : « Avec la nouvelle théorie, le parquet sortant de son rôle de poursuivant, se fait juge. Parmi les complices, il choisit ; il décide que celui-ci mérite d’être poursuivi et que cet autre ne doit pas être puni : et cela sans débats, sans avoir à donner les raisons de son choix : sic volo, sic jubeo. — Il est facile de voir les conséquences d’une telle théorie. C’est la porte ouverte à toutes les injustices. Prenons un exemple. Le