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les antinomies entre l’individu et la société

tement des parties et puisque tu es une partie, infime à la vérité et misérable de la noble ville de Viterbe, ta condamnation qui contente la communauté doit te contenter toi-même… Et je te démontrerai encore que tu dois estimer ton arrêt de mort aimable et décent. Car il n’y a rien d’utile et de convenable comme le droit, qui est la juste mesure des choses et il doit te plaire qu’on t’ait fait cette bonne mesure. D’après les règles établies par César Justinien, tu as reçu ton dû. Et ta condamnation est juste, par là plaisante et bonne. Mais serait-elle injuste et entachée et contaminée d’ignorance et d’iniquité (ce qu’à Dieu ne plaise), il te conviendrait encore de l’approuver… Car une sentence injuste, quand elle est prononcée dans les formes de la justice, participe de la vertu de ces formes et demeure par elles auguste, efficace, et de grande vertu. Ce qu’il y a de mauvais en elle est transitoire et de peu de conséquence et n’affecte que le particulier, tandis que ce qu’elle a de bon, elle le tient de la fixité et permanence de l’institution de justice et, par là, elle satisfait le général. En raison de quoi, Papinien proclame qu’il vaut mieux juger faussement que de ne point juger du tout ; car les hommes sans justice sont autant que bêtes en forêts, tandis que par justice se manifeste leur noblesse et dignité[1]. »

  1. A. France. Le Puits de Sainte-Claire, l’Humaine Tragédie.