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les antinomies entre l’individu et la société

jusqu’à présent la tâche de toute instruction supérieure. Apprendre quelque chose qui ne nous regarde en rien et sentir que le « devoir » consiste précisément dans cette activité « objective » ; apprendre à évaluer séparément le plaisir et le devoir, voilà la tâche et l’action inappréciable de la pédagogie. C’est pourquoi le philogogue fut jusqu’à présent l’éducateur par excellence : son activité elle-même donne l’exemple d’une monotonie s’élevant jusqu’au grandiose ; sous son égide, le jeune homme apprend à bûcher : première condition pour remplir plus tard, avec excellence, le devoir machinal (comme fonctionnaire de l’État, bon époux, rond de cuir, lecteur de journaux, soldat, etc[1]. »

Cette morale apparaît surtout dans les professions dites libérales, accompagnée de toutes sortes de préjugés destinés à maintenir l’honneur et le prestige du corps. — Dans le régime socialiste, la solidarité professionnelle ne serait vraisemblablement pas moins tyrannique que dans l’économie bourgeoise. Là aussi il y aura des moralistes et des politiques pour utiliser la vertu moralisatrice du travail et de l’enseignement professionnel. Le syndicalisme avoue son but qui est d’absorber l’individu dans le groupement professionnel. Les modernes syndicats admettent l’idée d’une discipline plus tyrannique et

  1. Nietzsche. La volonté de puissance, t. II, § 406.