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l’antinomie économique

tinomie. Dans son propre intérêt, et dans celui de l’œuvre qu’il veut mener à bien, l’individu doit s’associer. Et dans l’association même, l’initiative de l’individu, son apport personnel est forcément très réduit. Cette initiative ne peut aboutir qu’à une réforme partielle des modes de production ; rarement à un bouleversement, à une révolution véritable dans la technique industrielle. Il en est du producteur industriel comme du savant. Les neuf dixièmes du savoir du savant et de l’habileté du producteur sont dus à la collaboration scientifique, à la coopération industrielle. Le savant greffe sa découverte sur tout l’acquis scientifique antérieur ; l’inventeur industriel accepte et utilise tous les engins, tout le mécanisme industriel et économique de son époque : il n’innove que très peu. En industrie comme en science, la part de l’invention, de l’originalité, en un mot de l’individualité est infinitésimale. En tous cas elle est infiniment plus faible qu’en art, en religion, en poésie, en philosophie.

Faut-il aller toutefois jusqu’à nier complètement l’originalité individuelle dans l’invention industrielle comme semble le faire M. Draghicesco[1] ? Nous ne le croyons pas. Il y a dans l’invention industrielle, comme dans l’invention littéraire, artistique ou phi-

  1. « C’est l’intégration sociale qui a déterminé cette rencontre de courants imitatifs. Par conséquent toutes les conditions de l’invention sont sociales. » (L’Individu dans le déterminisme social, p. 237.)