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l’antinomie pédagogique

plus compliquées qui exigent une initiative de la part du sujet échappent aux procédés de dressage et à l’automatisme des habitudes acquises.

Reste enfin l’exemple, le prestige personnel de l’éducateur. Ce moyen d’action suppose une condition particulièrement difficile à réaliser : un personnel d’éducateurs vraiment exemplaires et possédant une supériorité morale éclatante et incontestée. Mais les vertus de l’éducateur, quand il en a, sont des vertus modestes, peu voyantes. Elles ne frappent pas l’enfant beaucoup plus fortement que ne font les mêmes vertus chez les autres personnes de son entourage. Ce qui parle aux yeux, le costume par exemple, a peut-être plus d’influence. Les éducateurs congréganistes ont perdu vraisemblablement une partie de leur prestige en perdant leur costume.

L’éducation enfin est limitée dans le nombre des données sûres, précises, indiscutables qu’elle transmet à l’enfant. En morale cela se réduit à peu de chose : quelques préceptes d’un caractère très général : ne pas tuer, ne pas voler, ne pas maltraiter autrui. Quant aux points contestés ou flottants de la morale (droits de la femme, de l’enfant, conception de la famille, etc.), l’éducateur ne peut guère trancher ces questions à l’école. Et s’il les tranche indiscrètement, la vie en éveillant la réflexion et le doute chez l’adulte aura tôt fait de lui faire réviser les solutions scolaires.