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l’antinomie pédagogique

lisme pédagogique ne sera pas moins conditionnel, ni moins précaire, ni, pour tout dire, moins illusoire que le libéralisme politique dont il se réclame.

Nos sociétés libérales étant étatistes, l’éducation sera étatiste. M. Durkheim proteste contre l’idée qui consisterait à briser le lien entre l’éducation et l’institution politique. Chez nous, comme dans la cité antique, l’éducation doit défendre l’institution politique[1]. Sans doute l’idéal national et étatiste doit être élargi dans notre système d’éducation moderne par l’idéal humanitaire. Mais peu importe pour la question qui nous occupe. Pour s’être élargi, l’idéal pédagogique n’en reste pas moins autoritaire. — Même les pédagogues anarchistes, ceux qui parlent d’éducation libertaire, d’auto-éducation, comme M. Elslander[2] définissent cette éducation en fonction des intérêts sociaux et des destinées sociales telles qu’ils les conçoivent ; ils la subordonnent à quelques grandes lois directrices de l’évolution sociale qu’il convient de favoriser et dont le terme semble être un endémonisme collectif où l’individu s’absorberait passivement dans l’uniformité et la médiocrité générales. Nietzsche assigne à notre éducation une mission nettement antiindividualiste. « Quelle est la mission de toute instruction supérieure ? — Faire de l’homme une machine. — Quel

  1. E. Durkheim. Loc. cit., p. 44.
  2. Elslander. L’éducation au point de vue sociologique.