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l’antinomie esthétique

pression individuelle et de jouissance individuelle ; parfois une cure d’âme, une station de psychothérapie, un exutoire de sentiments qui gênent la sensibilité, qui cherchent une issue et dont on se libère en les exprimant.

Ce développement de l’individualisme esthétique suppose une tolérance sociale inconnue aux sociétés primitives.

Aujourd’hui la législation n’intervient plus pour imposer des règles aux artistes ou pour sévir contre les œuvres d’art non conformistes, comme cela avait lieu aux temps où l’art avait une fonction religieuse et sociale. La censure esthétique est abolie. Il n’y a d’exception à cette tolérance que pour le cas d’atteinte directe à la morale (pornographie). Aujourd’hui, l’art est, comme la religion, chose privée et par suite les pouvoirs publics n’ont rien à y voir.

L’opinion est également assez tolérante pour les manifestations de l’individualisme esthétique. Du moins elle ne sévit pas contre elles d’une manière positive ; elle n’applique aux œuvres qui s’écarteraient trop du goût et du sentiment général que les sanctions négatives de l’indifférence, de l’ignorance et du silence.

Le libéralisme du public est tel à cet égard que les promoteurs de ligues contre l’immoralité de certaines manifestations esthétiques trouvent peu d’écho et de faveur dans le public. La raison pour