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l’antinomie dans l’activité volontaire

tion : la grande originalité renaîtra-t-elle ou le monde se contentera-t-il désormais de suivre les voies ouvertes par les hardis créateurs des vieux âges[1] ?

Aux prétentions d’une discipline sociale de plus en plus envahissante, l’individualisme oppose sa réclamation en faveur de l’individu.

Mais de quel individualisme s’agit-il ?

Nous pouvons distinguer ici, comme nous l’avons fait précédemment, à propos de l’intelligence et de la sensibilité, deux espèces d’individualisme. L’individualisme stirnérien est l’individualisme de la différenciation pure et simple ; de la différenciation quelle qu’elle soit et à tout prix. C’est l’individualisme de l’aventurier, du condottiere, de l’apache aussi bien que l’individualisme du grand homme d’État ou de guerre, du conducteur d’hommes, du créateur de valeurs. C’est l’individualisme d’Erostrate ou de César Borgia aussi bien que celui de Jésus, de Périclès ou de Washington.

  1. Stuart Mill constate la tendance au despotisme croissant de la société sur les actes de l’individu. « A part les doctrines particulières des penseurs (Comte) qui visent à établir un despotisme de la société sur l’individu, il y a aussi dans le monde une forte et croissante inclination à étendre d’une manière outrée le pouvoir de la société sur l’individu et par là force de l’opinion, et par celle de la législation. Or, comme tous les changements qui s’opèrent dans le monde ont pour effet d’augmenter la force de la société et de diminuer le pouvoir de l’individu, cet empiétement n’est pas un de ces maux qui tendent à disparaître spontanément, bien au contraire, il tend à devenir de plus en plus formidable. » (Essai sur la liberté, ch. 1.)