Page:Palante - Les antinomies entre l’individu et la société, Alcan, 1913.djvu/104

Cette page n’a pas encore été corrigée
98
les antinomies entre l’individu et la société

— L’homme fort est aussi l’homme libre ; le sentiment vivace de joie et de souffrance, la hauteur des espérances, la hardiesse des désirs, la puissance de la haine sont l’apanage du souverain et de l’indépendant ; tandis, que le sujet, l’esclave, vit opprimé et stupide[1]. » La liberté de l’individu, c’est la dose supérieure d’énergie vitale ; c’est la diversité ; c’est la volonté d’indépendance ; c’est l’originalité triomphante.

Ici nous voyons se dessiner l’antinomie entre l’individu et la société. La volonté de l’individu aspire à la diversité, à la puissance, à d’indépendance ; la société s’efforce de réprimer ce triple effort de la volonté individuelle[2].

La société veut s’assujettir les volontés comme les sensibilités et les intelligences. Elle veut discipliner les actes comme les sentiments et les idées. Dans un groupe, c’est toujours un peu un scandale quand un individu réclame en faveur du droit d’arranger sa vie à sa guise, en faveur de la liberté des goûts, des poursuites, de la conduite privée ou publique.

La marche de la civilisation semble aller, à cet égard, dans un sens contraire à l’individualisme.

  1. Nietzsche. Le voyageur et son ombre, § 9.
  2. « Chacun aime la licence, dit de Bonald ; et tous veulent l’ordre, et, certes, ici la volonté générale de la société n’est pas la somme des volontés particulières des individus. »