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les antinomies entre l’individu et la société

de la coopération qui accroît le pouvoir de l’homme sur la nature. — Les individualistes répondent à cela que le pouvoir de l’homme sur la nature n’est pas tout et que le développement scientique et industriel peut aller de pair pour beaucoup d’hommes avec un asservissement croissant des volontés et des caractères ; que la solidarité accrue ne s’accompagne pas nécessairement d’un accroissement du sentiment de puissance de l’individu, mais au contraire, du sentiment de sa dépendance. Si la solidarité augmente notre pouvoir collectif sur la nature, elle accroît aussi notre dépendance sociale ; car, en un sens, moins notre action personnelle est liée à celle des autres et plus elle est libre ; plus elle est liée à celle des autres et moins elle est libre. — Notre libération à l’égard des contraintes naturelles est trop souvent compensée par une aggravation des contraintes sociales. Toutes les formes d’association (et combien il en est de stériles au point de vue de l’accroissement de notre pouvoir sur la nature), réclament de l’individu le sacrifice d’une part de sa liberté ; et il s’en faut de beaucoup que ce sacrifice soit toujours racheté par des avantages correspondants. M. Fournière prétend que la liberté consiste, pour l’individu, à soumettre sa volonté personnelle à la volonté générale[1]. Mais la volonté générale se

  1. Fournière. Essai sur l’individualisme (F. Alcan).