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VAUVENARGUES.

chées. » Le Mercure, qui s’exprimait ainsi, concluait que l’ouvrage était « directement au-dessous de rien ». Quand l’exemple d’une telle injustice n’eût pas suffi à consoler Vauvenargues de l’indifférence du public à son égard, une approbation lui vint qui consacrait son talent mieux que ne l’eût fait toute la faveur du monde. Quelques jours à peine après la publication de son volume, il recevait de Voltaire ce billet :

« J’ai passé plusieurs fois chez vous pour vous remercier d’avoir donné au public des pensées au-dessus de lui… Il y a un an que je dis que vous êtes un grand homme, et vous avez révélé mon secret ! Je n’ai lu encore que les deux tiers de votre livre ; je vais dévorer la troisième partie. Je l’ai porté aux antipodes, dont je reviendrai incessamment pour embrasser l’auteur, pour lui dire combien je l’aime, et avec quel transport je m’unis à la grandeur de son âme et à la sublimité de ses réflexions comme à l’humanité de son caractère…. Vous êtes l’homme que je n’osais espérer, et je vous conjure de m’aimer. »

La lecture achevée, il lui écrivait encore : « J’ai usé, mon très aimable philosophe, de la permission que vous m’avez donnée ; j’ai crayonné[1] un des

  1. L’exemplaire ainsi annote au crayon de la main de Voltaire existe encore : il est déposé à la bibliothèque d’Aix.