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Depuis la première édition de cette ouvrage, ou plutôt le jour qu’elle a paru, l’on a publié certain écrit, qui n’auroit pu être mis au jour dans une circonstance plus favorable, si l’esprit de prophétie eût présidé à sa composition ; les principes sanguinaires qui l’ont dicté prouvent combien il est nécessaire de suivre la doctrine que j’ai mise en avant. Les deux partis se lisent par manière de représailles, & le libelle en question, au lieu de nous inspirer de l’épouvante, n’a fait que préparer la voie aux mâles résolutions de l’indépendance.

Les égards & même le silence, quel que soit leur motif, entraînent des suites fâcheuses, lorsqu’ils donnent la moindre autorité à des écrits méprisables & criminels ; si l’on convient de cette maxime, il s’ensuit que la production dont il s’agit, méritoit & mérite encore l’exécration du congrès & de l’amérique entière ; cependant comme la tranquillité domestique d’une nation dépend beaucoup de la pureté de ses mœurs générales, il vaut souvent mieux passer dédaigneusement certaines choses sous silence, que d’employer des méthodes nouvelles de désapprobation, capables d’altérer le moins du monde cette gardienne de notre repos & de notre sûreté. Peut-être si l’ouvrage dont je parle, n’a pas subi un châtiment public, en est-il redevable à cette prudence délicate. Ce n’est qu’un libelle audatieux contre la vérité, le bien public & l’existence du genre-humain, une méthode pompeuse d’offrir des hommes en sacrifice à l’orgueil des tyrans ; mais ce carnage général est un des privilèges de la royauté, une de ses conséquences nécessaires : car la nature ne connoit pas les rois, ils ne la connoissent pas non plus, & quoique créés par nous-mêmes, ils ne nous connoissent pas, & sont devenus les dieux de ceux qui les ont faits ce qu’il sont. Cet écrit a cependant un mérite, c’est qu’il