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celle des prêtres à dérober au public, dans les pays soumis au papisme, la connoissance de l’écriture sainte ; car dans toutes les circonstances, la monarchie est au gouvernement ce que le papisme est à la religion.

Ce n’étoit pas assez des maux de la monarchie ; nous y avons ajouté ceux de l’hérédité des couronnes ; & de même que la première est une dégradation de l’espèce humaine, la seconde, revendiquée à titre de droit, est une insulte & un mensonge faits à la postérité ; car tous les hommes étant originairement égaux, aucun d’eux ne sauroit tenir de sa naissance le droit d’assurer à ses descendans une préférence éternelle sur tous leurs semblables ; & supposé qu’un individu mérite de la part de ses contemporains quelques honneurs, renfermés dans les bornes de la décence, il peut se faire que ses descendans soient trop méprisables pour qu’ils leur soient transmis. L’une des plus fortes preuves que nous fournisse la nature, de l’absurdité du droit héréditaire de régner sur les hommes, c’est qu’elle le désapprouve ; autrement elle ne s’en feroit pas si souvent un jeu, en donnant aux états un âne à la place d’un lyon.

Secondement, ainsi que personne ne pouvoit dans le principe posséder d’autres honneurs que ceux qui lui étoient décernés, leurs dispensateurs n’avoient aucun titre pour disposer du droit de la postérité ; &, quoiqu’il leur fût permis de dire : « Nous vous choisissons pour notre chef », ils ne pouvoient ajouter, sans se rendre coupables d’une injustice manifeste envers leurs descendans : « Vos enfans & vos petits-enfans régneront sur nous à jamais », parce qu’une transaction aussi extravagante, aussi injuste, aussi contraire à la nature, pouvoit, à la prochaine hérédité, les soumettre au gouvernement d’un scélérat, d’un sot.