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hommes, il ne l’est pas moins de la défendre par l’autorité de l’écriture. Car la volonté du tout-puissant, déclarée par l’organe du prophète Samuel & de Gédéon, est expressément contraire au gouvernement des rois. Tous les passages anti-monarchiques de la bible ont été commentés avec adresse dans les monarchies, mais incontestablement ils méritent de fixer l’attention des pays dont le gouvernement n’est pas encore formé. Rend à César ce qui est à César, est la doctrine adoptée par les cours ; cependant elle ne prête aucun appui au gouvernement monarchique ; car, au tems où ces paroles furent prononcées, les juifs n’avoient point de roi ; ils étoient en quelque sorte vassaux des romains.

Depuis la date de la création, suivant Moyse, près de trois mille ans s’écoulèrent avant que toute la nation des juifs, égarée par un même vertige, demandât un roi. Jusqu’alors la forme de son gouvernement, excepté dans les cas extraordinaires où le tout-puissant se montroit, avoit été une espèce de république administrée par un juge & les vieillards des tributs. Elle n’avoit point de rois, & c’étoit pécher que de donner ce titre à qui que ce fût, hormis au dieu des armées. Et lorsqu’on réfléchit sérieusement à l’hommage idolâtre qu’on rend à la personne des rois, on n’est pas surpris que le tout-puissant, toujours jaloux de sa gloire, désapprouvât un mode de gouvernement qui usurpe avec tant d’impiété la prérogative du ciel.

La monarchie est rangée dans l’écriture parmi les péchés des juifs, pour lesquels un grand châtiment leur est réservé. L’histoire de cet égarement mérite une attention sérieuse.

Les enfans d’Israël étant opprimés par les madianites, Gédéon marcha contre ces ennemis, à la tête d’une petite armée, & graces à la céleste entre-