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se flatte qu’ils agiront comme ceux-ci pourroient agir s’ils étoient tous présens. Cependant la colonie continue de s’accroître ; il devient nécessaire d’augmenter le nombre des représentans, &, pour qu’ils fassent une égale attention aux intérêts de chaque portion de la colonie, on juge à propos de la partager en un certain nombre de divisions, dont chacune envoie à l’assemblée générale un nombre de représentans proportionné à son étendue. De peur que ceux-ci ne séparent leurs intérêts de ceux qui les choisissent, la prudence fait sentir la nécessité des élections fréquentes, parce que les personnes élues, retournant, dans un court espace, se confondre avec la masse des électeurs, ceux-ci ont pour garant de leur fidélité au vœu général, la crainte où ils seront de donner des armes contre eux-mêmes ; &, comme ces changemens réitérés établiront un même intérêt dans chaque partie de la communauté, il en résultera qu’elles se prêteront sans effort un secours mutuel, résultat fondamental, d’où dépend la force du gouvernement & le bonheur de ceux qui sont gouvernés, ce qu’on attendoit en vain du titre insignifiant de roi.

Voilà donc l’origine & les progrès du gouvernement. C’est un supplément nécessaire à l’insuffisance de la morale. Voilà aussi son but ; savoir, la liberté & la sûreté. Et, de quelque splendeur que nos yeux soient éblouis, de quelques mots sonores que nos oreilles soient chatouillés ; quelque préjugé qui égare nos desirs, quelqu’intérêt qui obscurcisse notre jugement, la simple voix de la nature & de la raison proclamera la justice de ces apperçus.

L’idée que je me fais du gouvernement est puisée dans un principe que la nature a consacré, & contre lequel échoue l’art des sophistes. C’est que plus une chose est simple, moins elle est sujette à se désorganiser, plus elle se répare aisément lors-