sistance, & le réduiroient à une situation, où l’on pourrait dire de lui qu’il s’éteint plutôt qu’il ne meurt.
Ainsi la nécessité, irrésistible comme la loi de la gravitation, formerait bientôt en société notre peuplade ; & les douceurs mutuelles de cet état compenseroient avec usure les obligations des lois & du gouvernement, tant que la justice présideroit à l’accord de ses membres. Mais comme, excepté le ciel, rien n’est à l’abri des atteintes du vice, par une indispensable fatalité, ils se relâcheroient de leur attachement primitif, à mesure qu’ils surmonteroient les premières difficultés du changement de séjour, difficultés qui les auroient unis dans l’origine. De-là le besoin urgent d’établir une forme de gouvernement qui supplée au défaut des vertus morales.
Un arbre touffu leur présente un emplacement convenable pour une salle publique ; & sous ses branches toute la colonie s’assemble afin de délibérer sur les affaires générales. Il est plus que probable que ses premières loix n’auront d’autre titre que celui de réglemens, & que la mésestime générale sera l’unique châtiment de quiconque osera les enfreindre. Chacun aura naturellement droit de séance dans ce premier parlement.
Mais la colonie s’accroît, les affaires croissent en proportion ; les membres de l’état sont plus disséminés, & l’éloignement de plusieurs ne leur permet pas de se réunir à tout propos comme au temps où leur nombre étoit peu considérable, où leurs habitations se touchoient, où les affaires n’étoient ni importantes ni multipliées. On s’apperçoit qu’il est avantageux de laisser le pouvoir législatif entre les mains d’un certain nombre de représentans choisis dans le sein de la communauté ; on leur suppose les mêmes intérêts qu’à leurs commettans ; & l’on