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des loix d’intérêt réciproque, & on leur obéit parce qu’il est de l’intérêt des parties de s’y soumettre, & nullement parce qu’elles sont l’ouvrage des gouvernemens.

Mais combien de fois la tendance naturelle de la société n’a-t-elle pas été dérangée & détruite par les opérations du gouvernement, quand, loin d’être greffé sur la nature, il veut exister pour lui & qu’il agit par faveurs ou oppressions ; alors il devient la cause des malheurs qu’il croit prévenir.

Si nous jettons en arrière un coup-d’œil sur les querelles & les révoltes qui ont eu lieu en angleterre, nous voyons qu’elles ne naissent pas du manque de gouvernement ; mais que le gouvernement en a été la première cause : au lieu de consolider la société, il la divisoit, lui ôtoit sa cohérence naturelle, formoit des mécontens, alimentoit des désordres qui, sans lui, n’auroient pas existé. Dans les associations que les hommes contractent entre eux, dans lesquelles ils agissent purement d’après les principes de la société, voyez combien toutes les parties sont unies ; & les gouvernemens, loin d’être la cause ou le moyen de l’ordre, l’est quelquefois de leur destruction.

Les mouvemens de 1780, n’ont d’autre origine que la conservation des préjugés que le gouvernement avoit lui-même entretenus, mais quant à l’angleterre, ces mouvemens avoient encore d’autres causes.

Des taxes excessives & inégalement réparties, quoique déguisées dans leur mode, produisent nécessairement des effets qui se font tôt ou tard sentir ; et comme ils réduisent par-là une grande partie de la société à la pauvreté et au mal-aise, ils sont constamment préparés à l’insurrection ; et, dépourvus comme ils le sont malheureusement, des moyens de connoître leur état et d’exprimer leurs plaintes,