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que la sagesse humaine puisse inventer, elle seroit plutôt un être de raison ou factice, qu’un être réel. Elle étoit une conséquence des principes primordiaux de la société & de la civilisation, de l’usage qui la consent & la maintient réciproquement, de la circulation perpétuelle des intérêts qui, passant au travers de mille & mille canaux, vivifient la masse entière de la communauté. Elle seroit due enfin à tous ces objets beaucoup plus qu’à aucune des institutions que le meilleur des gouvernemens puisse former, parce que la sûreté & le bonheur de la société & de tous les individus en dépendent.

L’état le plus parfait de civilisation est celui où le besoin du gouvernement se fait le moins sentir, & où chacun peut régler ses propres affaires & se gouverner soi-même. Mais ce principe est si contraire à la pratique des anciens gouvernemens, que leurs dépenses augmentent dans la proportion où ils devroient les diminuer. L’état civilisé exige un très-petit nombre de loix générales, & d’un usage si habituel & si nécessaire, que leur effet seroit absolument le même quand elles ne seroient pas appuyées par la forme du gouvernement.

Considérons que les principes réunissent d’abord l’homme en société, & quels motifs déterminent ensuite leurs relations mutuelles ; nous trouvons dans l’intervalle qui nous conduit de la société à ce qu’on nomme gouvernement que presque tout ce qui lui étoit nécessaire, s’effectuoit par l’action & réaction de chacune des parties de cette société.

L’homme, relativement à l’art de se gouverner en société, a beaucoup plus d’ordre & de conduite qu’il ne l’imagine, ou que ses gubernateurs voudroient le lui faire croire.

Toutes les loix fondamentales de la société sont des loix que prescrit la nature, & celles de commerce soit entre les individus, soit entre les nations, sont des