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les drôles.

Et cela réjouit bien fort, en vérité,
L’escroc qui les connaît, la fille qui les aime
De cet étrange amour qu’on porte à ceux-là même
Qu’on chérit d’autant plus qu’ils vous ont plus coûté.

Car on s’est entr’aidé, sortant des mêmes bouges.
Ces messieurs éculaient jadis leurs talons rouges
Au tripot. Ces Fronsac jurant la sarpejeu,
Avant leur opulence ont sali leur misère.
En ce temps-là, c’était à l’heure nécessaire
Et non pour son plaisir qu’on s’asseyait au jeu.

Aussi l’ami — l’ancien — les suit d’un œil d’envie,
Leur ami resté gueux et tapi dans la vie
— Comme ils étaient hier, comme ils seront demain, —
Admire en connaisseur leurs tours de passe-passe,
Et, quand devant son ombre un de ces heureux passe,
Dit : « Ce diable d’un tel, il a fait son chemin !… »

Mais eux ! comme ils sont loin de leur piètre origine !
On les étonnerait d’en parler, j’imagine.