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qu’en 1900 M. L. Couturat, tout en admettant que « l’école italienne avait atteint des résultats merveilleux de rigueur et de subtilité », demeurait incertain « si l’on devait les attribuer à l’utilité du symbolisme logique ou à la pénétration des savants qui le manient[1] », en 1905 il affirma sans hésitation « que c’est l’instrument indispensable pour rejoindre la pureté logique des concepts et la rigueur déductive des raisonnements[2] ».

On peut ajouter que cet instrument ne cesserait pas d’être précieux, même s’il ne devait pas être jugé nécessaire par des esprits souverains. Ainsi, le fait que Diophante (325-409) a résolu des systèmes d’équations lorsque les artifices de l’Algèbre étaient encore ignorés[3], n’ôte rien au prix inestimable de ces procédés : puisque, moyennant leur aide, des intelligences médiocres peuvent résoudre aujourd’hui des questions que Diophante, avec les moyens dont la science disposait alors, n’aurait pas pu résoudre, ni même soupçonner. De même, les chemins de fer et les bateaux à vapeur permettent aujourd’hui à qui que ce soit de franchir aisément des distances, qu’autrefois seulement peu de gens très audacieux osaient braver.


15. Un de mes amis se plaisait à lancer contre toute espèce de Logique une objection qu’il estimait décisive : « elle ne guérit ni les idiots ni les fous, et pour les sages elle ne sert à rien ». Mais il reconnut son erreur, lorsque je lui donnai l’exemple d’un rustre, qui entendant parler du microscope, demandait s’il guérissait les aveugles ; et, ayant appris que non, ne comprenait pas quel avantage pouvaient en tirer ceux qui ont les yeux sains.

En effet : comme le Microscope est un instrument et la Bactériologie est une science, et ni l’un ni l’autre ne nous apprennent à voir, ainsi l’Idéographie logique est un instrument et la Logique mathématique est une science, et ni l’une ni l’autre ne nous apprennent à raisonner. Mais, comme le Microscope permet de voir les bacilles qui par leur petitesse échappent à la vue ordinaire, de même l’Idéographie logique nous permet de représenter des concepts qui par leur subtilité échappent à toute détermination précise avec le langage ordinaire.

  1. Les Mathématiques au Congrès de Philosophie : L’enseignement mathématique, Paris, Carré et Naud, 15 nov. 1900, p. 401.
  2. Les Principes des Mathématiques. Paris, Alcan, 1905, p. v, vi (Avant-Propos).
  3. Διοφάντου Ἀλεξανδρέως Ἀριθμητιϰῶν.